Les "lois bâillons" ("Ag-gag Laws") aux Etats-Unis permettent de poursuivre toute personne qui s'introduit clandestinement dans une exploitation agricole afin d'en dénoncer les pratiques et/ou qui prend des clichés ou enregistre des vidéos à l'intérieur des sites concernés.
Les toutes premières lois bâillons ont été mises en place il y a près de 30 ans par certains états (Kansas dès 1990, Montana, Dakota du nord) dont l'élevage est un acteur puissant de leur économie. D'autres états ont suivi bien plus tard.
Elles constituent une atteinte grave à la liberté d'expression reconnue aux citoyens américains en vertu du 1er amendement de la constitution.
Le Kansas, le Dakota du nord, le Montana, le Missouri, la Caroline du nord, l'Arkansas,l'Idaho, l'Iowa et l'Utah se sont dotés de cet "outil" répressif.
Ces lois ont pour objet, notamment, de rendre toute prise d'images, vidéos illégales et susceptibles de peines d'amendes voire d'emprisonnement. Ceci, afin de faire en sorte que des images montrant des actes de maltraitance animale ne puissent être diffusées ensuite et nuire ainsi à l'économie.
Dans les états de l'Idaho et de l'Utah ces lois avaient été jugées contraires à la constitution américaine à la suite de "civil rights" complaints.
La première fois qu'une loi bâillon a été jugée contraire à la constitution fédérale concerne celle mise en place dans l'Idaho. Par décision en date du 3 août 2015, la Cour fédérale de district du Kansas a prononcé l'inconstitutionnalité de la loi. En appel, la cour d'appel fédérale (en l'occurrence celle du 9ème circuit) a confirmé en janvier 2018 la décision rendue en première instance.
Voici maintenant que les activistes de la cause animale s'attaquent à la loi bâillon du Kansas, la plus ancienne d'entre elles.Cette loi ,appelée "Farm Animal and Field Crop and Research Facilities Protection Act", existe depuis 1990.
Elle apparait dans le recueil des lois de l'état au chapître 47 sous l'intitulé "Livestock and Domestic Animals" à l'article 18.
Le texte original en est le suivant
“Under the act, no person shall, without the effective consent of the owner and with the intent to damage the enterprise conducted at the animal facility, damage or destroy an animal facility or any animal or property in or on an animal facility. A person is also prohibited from exercising control over an animal or property. The act makes it illegal for a person to enter an animal facility that is not open to the public to take pictures or video. Violation is a nonperson felony if the property damage is $25,000 or more. An illegal entry that involves taking pictures or video is a class A, nonperson misdemeanor.”
En voici la traduction en français:
"En vertu de la loi, il est interdit à quiconque, sans le consentement exprès du propriétaire et dans l'intention de nuire à l'activité exercée dans une entreprise animalière, d'endommager ou de détruire une entreprise animalière ou tout animal ou bien se trouvant dans ou sur le terrain d'une entreprise animalière. Il est également interdit à une personne d'exercer un contrôle sur un animal ou une propriété. En vertu de la loi, il est illégal pour une personne d'entrer dans une entreprise animalière où le public n'est pas autorisé à prendre des photos ou à enregistrer des vidéos. Un tel acte constitue un crime si les dommages matériels s'élèvent à 25 000 $ ou plus. Une entrée illégale afin de prendre des photos ou une vidéo constitue un délit de classe A."
Les activistes à l'origine de la procédure contestent la constitutionnalité de la loi.
Certes, il n'est pas établi que des poursuites aient été un jour engagées en vertu de ce texte mais les demandeurs à la procédure considèrent qu'en tout état de cause cette loi a permis à la filière agricole d'échapper à la surveillance du public.
Les demandeurs sont:
L' ALDF (Animal Legal Defense Fund) , le "Center for Food Safety" ("CFS")et des organisations de protection des animaux de ferme du Kansas.
Les défendeurs sont:
Jeffrey Colyer, Gouverneur du Kansas et Derek Schmidt, Procureur général du Kansas,
La procédure a été engagée devant la Cour de district US pour le Kansas le 4 décembre 2018.
Selon le directeur juridique du George Kimbrell "La loi, vieille de 30 ans a trop longtemps fait taire les dénonciateurs qui cherchent à protéger les animaux de la cruauté".Les demandeurs soutiennent que "les animaux au Kansas sont élevés dans des fermes-usines inhumaines".
Quant au sort des autres lois bâillons qui ont été contestées voici leur statut actuel:
- Utah: la loi a été jugée inconstitutionnelle en 2017. L'état n'a pas interjeté appel. La décision est donc définitive.
- Caroline du nord et Iowa: les procédures contestant la constitutionnalité des lois sont en cours.
A suivre !