La professeure de droit international Anne Peters, chercheuse au Max-Planck Institut à Heidelberg, vient de publier un ouvrage remarquable intitulé "Animals in International Law" (Publié dans "Collected Courses of The Hague Academy of International Law, Recueil des Cours Vol. 410 ;Leiden: Brill 2020).
Malheureusement, la publication ,en langue anglaise, est largement passée inaperçue dans le monde académique français et c'est bien dommage.
Pourtant, cet ouvrage de Anne Peters est brillant, passionnant. Il aborde sur plus de 400 pages le statut des animaux en droit international.
Anne Peters part du constat que la souffrance animale infligée par l'homme est un problème global ayant des répercussions pour tous les êtres humains et pour la planète. Elle considère que nous devons trouver dès lors des solutions juridiques globales.
A problème global, solution globale.
Au chapitre I l'auteure présente les faits, examine l'état actuel du droit national de l'animal et démontre l'intérêt d'avoir une approche globale pour remédier aux disparités voire à l'absence d'outils de protection juridique des animaux dans bon nombre de pays.
En son chapitre II, le livre fait le point sur les principaux régimes juridiques internationaux qui concernent les animaux, à savoir, les traités internationaux de conservation d'une part et les règles de santé et bien-être animal de l 'OIE d'autre part. Anne Peters y aborde aussi la question de la contribution des institutions financières au mal être et à la souffrance animale par le biais du financement de l'élevage industriel.
Le chapitre III est consacré à la Commission Baleinière Internationale et aux limites de la protection offerte par elle aux baleines. Ce régime institué par la CBI créé un clivage entre les états membres et d'importants états baleiniers qui n'en font pas partie ( Le Japon a quitté la CBI en 2019).
Le chapitre IV analyse les règles de protection édictées par le plus important acteur intergouvernemental et supranational, l'UE.
Au chapitre V, l'auteure analyse les effets du droit du commerce international sur le bien-être animal.
Le chapitre VI examine la façon dont les animaux sont victimes de conflits armés, qu'il s'agisse d'animaux d'élevage, d'animaux de guerre ou d'animaux sauvages libres.
Ce thème est très rarement abordé dans la littérature juridique consacrée au droit de l'animal. Anne Peters relève que le droit humanitaire international a presque totalement oublié les conséquences des conflits armés sur les animaux. Elle aborde en particulier en quoi il est condamnable au plan moral d'utiliser des animaux comme arme de guerre ou comme combattants. L'auteure considère qu'il faudrait cesser toute utilisation des animaux lors de conflits armés.
Le chapitre VII aborde la question des droits juridiques de l'animal. L'auteure démontre à quel point accorder des droits fondamentaux aux animaux pourrait parfaitement s'intégrer au droit international, quels en seraient les avantages pour les animaux et de quelle façon ces droits pourraient être codifiés.
Au chapitre VIII Anne Peters conclut que le droit international public actuel crée plus de mal que de bien pour les animaux. L'auteure montre de quelle façon un consensus global permettant d'améliorer le bien-être animal peut être envisagé. Dans ce chapitre, l'auteure relève l'existence d'une véritable dynamique normative, notamment au niveau du droit des traités internationaux, vers une plus grande reconnaissance du bien-être animal en tant que principe juridique.
Anne Peters suggère diverses stratégies juridiques permettant d'améliorer le statut des animaux et de combler les "trous" juridiques par une interprétation progressive des traités, lors de l'élaboration des traités ainsi que dans la représentation des animaux au plan juridique.
Voici un ouvrage à mettre entre toutes les mains de juristes par la profondeur et la finesse d'analyse de l'auteure, l'exhaustivité des sujets abordés et l'intérêt des solutions proposées.