Nous avons tous salué la reconnaissance par le code civil en 2015 de la sensibilité de l'animal (article 515-14 du code civil). La plupart des juristes ont considéré qu'il s'agissait d'un pas important dans un mouvement qui, à terme, devrait aboutir à l'attribution d'une personnalité juridique à l'animal ou du moins à certains d'entre eux.
Cependant, les animaux, s'ils ne sont plus des biens, restent néanmoins soumis au régime juridique des biens...sauf dispositions particulières qui les protègent.
Dans la pratique, nous devons cependant constater que la situation vécue au quotidien par les animaux n'évolue guère. J'aurai l'occasion de revenir prochainement sur la condition des animaux d'élevage.
Aujourd'hui à la veille du très réputé Prix de l'Arc de Triomphe qui se déroule demain à Chantilly, je souhaite aborder la situation des chevaux de pur sang qui, depuis déjà fort longtemps, sont l'objet d'un " business" très juteux pour les éleveurs et l'ensemble de la filière équine qui représente en France 12 milliards d'euros de chiffre d'affaire annuel.
Ce jour le Figaro a publié en page 17 un article consacré aux " Gènes en or des cracks de l'Arc" extrêmement intéressant par les données chiffrées communiquées .
L'on y apprend que:
- les ventes de " yearlings" a Deauville ont rapporté 62,29 M€ en 2014;
- le célèbre pur sang baptisé "Le Havre"( nom peu gracieux pour un cheval...) est assuré pour ...30 millions d'euros et réalise chaque année ..190 saillies à 35'000 € l'unité ! Ce cheval réalise par an un chiffre d'affaire de 6,6 millions d'euros...;
- Mieux encore: le fameux " Galileo" , étalon le plus cher en Europe facture ou plutôt fait facturer sa saillie.... 350,000 euros !!!;
- les naissances de pur sang en France représentent 5000 chevaux sur les 48000 " produits " chaque année ....
L'article précise, je cite " il y a 385 étalons pur sang "stationnés " en France ....
On aura compris que le cheval pur sang et en particulier les étalons sont l'objet d'enjeux considérables au point que leur coût est tel qu'ils sont syndiqués c'est à dire qu'ils sont vendus par parts...Vous pouvez ainsi acquérir la part d'un "être sensible" pour quelques milliers voire dizaines de milliers d'euros...dans certains cas les prix s'envolent avec des parts à plus de 300'000 €( pour "Sliyouni" appartenant à l'Aga Khan).
Enfin l'article met le doigt sur les manipulations génétiques qui produisent des chevaux de plus en plus performants : on apprend qu'en 1920 le temps de course a l'Arc de Triomphe était de 2'39 et de 2'24'49 en 2011 soit en 91 ans un gain d'un peu plus de 14 secondes....
Que penser de cela ?
L'animal ,en dépit de l'évolution de son statut dans le droit, reste dans les faits un "bien" dont l'homme tente de tirer le maximum en l'exploitant et en effectuant des manipulations génétiques.
Que signifie en fin de compte et dans la pratique la reconnaissance de sa sensibilité " ?
À quoi cela sert-il ?
Quelques améliorations relatives à une meilleure bien-traitance mais aucunement une remise en question et en cause de son exploitation.
Est-il acceptable au plan éthique qu'un cheval pur sang soit contraint ( ce n'est pas un choix de sa part) de "réaliser" 190 saillies par an pour remplir les poches des propriétaires dont la plupart ne sont aucunement "passionnés "par le cheval mais uniquement ou principalement par les revenus et profits qu'ils espèrent en tirer ?
Non cela n'est pas acceptable.
Avons-nous réellement progressé au fil du temps dans notre rapport à l'animal ? je n'en suis pas persuadé...
Le cheval de pur sang , être sensible ou machine à cash ?
Juridiquement il est un être sensible mais dans les faits il n'est qu'un bien que l'on fait fructifier et que l'on exploite jusqu'à la fin. L'animal machine existe donc encore...
S'il échoue dans sa mission d'étalon, le pur sang est abandonné à son triste sort...certains finiront à l'abattoir, d'autres végèterons dans des prés quasiment abandonnés.
Rappelons-nous Ourasi ce crack qui a remporté 4 prix d'Amérique ! Il fut un piètre " étalon" et ses propriétaires qui en détenaient des " parts" l'abandonneront; sans quelques bonnes âmes ( dont sa " nounou" Annie Jumiel) il n'aurait pas vécu une belle retraite !
Et que dirait un suisse dont le pays a reconnu la "dignité" de l'animal il y a plus de 20 ans dans sa constitution et qui est "juridiquement" protégée ? est-il digne de faire réaliser 190 saillies par an à un pur sang ? est-il digne de transformer des poulinières en ventres à futures " machines à cash" ?
La réponse est clairement non. Mais les intérêts économiques sont tels que l'homme n'est pas prêt à modifier dans la pratique son rapport à l'animal ou du moins à la plupart d'entre eux.
"Sensibilité" de l'animal des mots pour l'homme , des maux pour l'animal. Triste constat.
Aujourd'hui à la veille du très réputé Prix de l'Arc de Triomphe qui se déroule demain à Chantilly, je souhaite aborder la situation des chevaux de pur sang qui, depuis déjà fort longtemps, sont l'objet d'un " business" très juteux pour les éleveurs et l'ensemble de la filière équine qui représente en France 12 milliards d'euros de chiffre d'affaire annuel.
Ce jour le Figaro a publié en page 17 un article consacré aux " Gènes en or des cracks de l'Arc" extrêmement intéressant par les données chiffrées communiquées .
L'on y apprend que:
- les ventes de " yearlings" a Deauville ont rapporté 62,29 M€ en 2014;
- le célèbre pur sang baptisé "Le Havre"( nom peu gracieux pour un cheval...) est assuré pour ...30 millions d'euros et réalise chaque année ..190 saillies à 35'000 € l'unité ! Ce cheval réalise par an un chiffre d'affaire de 6,6 millions d'euros...;
- Mieux encore: le fameux " Galileo" , étalon le plus cher en Europe facture ou plutôt fait facturer sa saillie.... 350,000 euros !!!;
- les naissances de pur sang en France représentent 5000 chevaux sur les 48000 " produits " chaque année ....
L'article précise, je cite " il y a 385 étalons pur sang "stationnés " en France ....
On aura compris que le cheval pur sang et en particulier les étalons sont l'objet d'enjeux considérables au point que leur coût est tel qu'ils sont syndiqués c'est à dire qu'ils sont vendus par parts...Vous pouvez ainsi acquérir la part d'un "être sensible" pour quelques milliers voire dizaines de milliers d'euros...dans certains cas les prix s'envolent avec des parts à plus de 300'000 €( pour "Sliyouni" appartenant à l'Aga Khan).
Enfin l'article met le doigt sur les manipulations génétiques qui produisent des chevaux de plus en plus performants : on apprend qu'en 1920 le temps de course a l'Arc de Triomphe était de 2'39 et de 2'24'49 en 2011 soit en 91 ans un gain d'un peu plus de 14 secondes....
Que penser de cela ?
L'animal ,en dépit de l'évolution de son statut dans le droit, reste dans les faits un "bien" dont l'homme tente de tirer le maximum en l'exploitant et en effectuant des manipulations génétiques.
Que signifie en fin de compte et dans la pratique la reconnaissance de sa sensibilité " ?
À quoi cela sert-il ?
Quelques améliorations relatives à une meilleure bien-traitance mais aucunement une remise en question et en cause de son exploitation.
Est-il acceptable au plan éthique qu'un cheval pur sang soit contraint ( ce n'est pas un choix de sa part) de "réaliser" 190 saillies par an pour remplir les poches des propriétaires dont la plupart ne sont aucunement "passionnés "par le cheval mais uniquement ou principalement par les revenus et profits qu'ils espèrent en tirer ?
Non cela n'est pas acceptable.
Avons-nous réellement progressé au fil du temps dans notre rapport à l'animal ? je n'en suis pas persuadé...
Le cheval de pur sang , être sensible ou machine à cash ?
Juridiquement il est un être sensible mais dans les faits il n'est qu'un bien que l'on fait fructifier et que l'on exploite jusqu'à la fin. L'animal machine existe donc encore...
S'il échoue dans sa mission d'étalon, le pur sang est abandonné à son triste sort...certains finiront à l'abattoir, d'autres végèterons dans des prés quasiment abandonnés.
Rappelons-nous Ourasi ce crack qui a remporté 4 prix d'Amérique ! Il fut un piètre " étalon" et ses propriétaires qui en détenaient des " parts" l'abandonneront; sans quelques bonnes âmes ( dont sa " nounou" Annie Jumiel) il n'aurait pas vécu une belle retraite !
Et que dirait un suisse dont le pays a reconnu la "dignité" de l'animal il y a plus de 20 ans dans sa constitution et qui est "juridiquement" protégée ? est-il digne de faire réaliser 190 saillies par an à un pur sang ? est-il digne de transformer des poulinières en ventres à futures " machines à cash" ?
La réponse est clairement non. Mais les intérêts économiques sont tels que l'homme n'est pas prêt à modifier dans la pratique son rapport à l'animal ou du moins à la plupart d'entre eux.
"Sensibilité" de l'animal des mots pour l'homme , des maux pour l'animal. Triste constat.